Day 45 PCT : Mont Whitney 4400m - Km 1246

4 juin 2022 : 15 mi (Mt Whitney) + 8 mi / 24 km (Mt Whitney) + 13 km - D+ 1200m / D- 1250m - Total : 808 miles / 1300 km

(Variante du PCT - retour dans la journée au km 1263 + 13 km)

Journée que j’ai appelée sur mon planning « zero day »… ironique car je vais essayer de grimper à une hauteur que je n’ai jamais réussi à atteindre jusque là.

Je l’ai appelé « zero » car le Whitney n’est en fait pas sur le PCT, mais nous sommes si proches du plus haut sommet continental américain que quasiment tous les hikers le tentent.

J´ai pour ma part hésité car, d’une part, je me trimballe cette crève et d’autre part, je sais que j’ai une limite donc à l’altitude.

Lorsque je vais à Chamonix et que je monte à l’Aiguille du Midi, je reste bloqué à 3800m, impossible de monter plus haut, mal de montagne, nausée… il suffit que je monte une marche de plus sur la terrasse qui donne sur le Mont Blanc, et je suis pour le coup littéralement terrassé. Mais plusieurs choses me disent que c’est possible ici. D’une part, j´ai déjà fait un 4000 et justement aux Etats-Unis (le Mont Elbert dans le Colorado), et d’autre part, depuis le début du PCT, même dans le Sud de la Californie, nous sommes très régulièrement à des hauteurs de 2000/2500m, et depuis l’entrée dans les Sierras nous atteignons les 3000m. Je pense donc que je suis acclimaté, même si le Whitney arrive tôt dans les Sierras. D’ailleurs, le campement qui sert de base au Whitney, Crabtree, est déjà à 3200m.

Enfin, pour monter le Whitney, je n’ai pas besoin de porter mon sac complet, tout reste au campement sauf les affaires chaudes, de quoi manger et boire. Et ça, moralement, ça fait la différence.

Je me décide donc à le tenter et je partirai à 7h, le temps d’une nuit un peu reposante car la veille à été une journée à 40 km. j’avais décidé à la base de faire comme beaucoup font, partir à minuit pour arriver au lever du soleil, 5h. Il me reste un peu de raison pour ne pas choisir cette option: monter de nuit, dans le froid et la fatigue pour un lever de soleil qui certes doit valoir son pesant, mais qui reste tout de même hypothétique. Il suffit de nuages au sommet et rideau le lever de soleil !

Mon ami Pirate, qui a choisi cette option, m’apprendra plus tard, qu’il y avait en effet quelques nuages.

Le Whitney, c’est donc 12 km de montée pour 1200m de dénivelé. On compte généralement 5h pour arriver au sommet.

Je suis content de partir à 7h car je ne m’attendais pas à une approche du Whitney aussi belle, d’abord le lac Timberline et la rosée du matin qui effleure d’ une fine couche vaporeuse la surface de l’eau.

Quelques marmottes peu espiègles et c’est ensuite le "Guitar Lake", dont ma perspicacité me fait dire que cela doit être à cause de sa forme.

Pour l’instant, rien de difficile, ça monte gentiment. Passé le lac, l’inclinaison se prononce et j’arrive rapidement à 3500m.

Tout va bien.

J´ai prévu de m’arrêter à 3800m pour faire une pause, manger et bien boire.

J´avance très lentement, et prends le temps d’observer des paysages auxquels je ne m´attendais pas : deux magnifiques lacs en contrebas, très peu de neige et un terrain qui dénient de plus en plus minéral.

Apres la pause, je repars et les lacets deviennent un peu plus étroits.

J’arrive aux symboliques 4000m, hauteur qui était mon précédent record, et je suis surpris de ne ressentir aucun mal de montagne, aucun mal de tête, pas de vertige.

Bien sûr, je ressens le poids de l’altitude un peu dans les jambes mais pas au point de devoir m’arrêter. Je continue d’avancer lentement… « slowly but surely ».

4200 m, il est temps d’enfiler la doudoune.

Le vent fait son apparition et il amène le froid.

Il reste 2,5 km et le sentier jusque là assez large devient un passage beaucoup plus escarpé avec pas mal de pierres.

On peut d’ailleurs voir des 2 cotés de chaque versant avec des vues vertigineuses. Faux pas interdits. Je commence à voir mes compagnons de route redescendre. J’aurais bien aimé faire une photo de groupe avec eux au sommet, mais ce n’est pas grave. De toute façon, c’est mon moment, un challenge personel. Je sens que je n’aurai pas de problème à atteindre le sommet désormais.

La fin est plus douce et j’aperçois le refuge. C’est très rare d’en voir aux sommets américains comme en Europe.

j’atteins donc le Mont Whitney au bout de presque 5 h, très heureux et fier de moi. C’est donc le plus haut sommet franchi pour moi.

Je suis sur le toit de l’Amérique continentale, rien au dessus, tout va très bien ! Et la vue à 360 degrés est magnifique, d’autres sommets à perte de vue, la vallée tout en dessous.

Un dernier rocher plat avant le grand plongeon et quelques plaques qui confirment le nom et l’altitude, permettent de faire les photos souvenirs qui vont bien.

Je dédie ce petit exploit personnel à mes filles !

Je profite de mon « Whitney moment » pendant 2 bonnes heures.

Je croise un trio anglais qui m’offre une goutte de Whisky. Allez, pourquoi pas pour l’anecdote.

Je croise aussi des têtes connues du PCT, Viking et Shepard.

Il me faudra seulement 2h30 pour redescendre.

Au campement, plus personne. Demain, c’est un autre col, un autre sommet qui m’attend, le Forrester qui, lui, est sur le tracé du PCT et qui culmine à 4000m.

L’objectif est de s’en rapprocher un peu aujourd’hui pour arriver à le faire pas trop tard.

Je repars donc pour 8 miles. C’est un peu difficile après cette grosse journée.