25 juillet 2022 : 28 mi / 45 km - D+ 1050m / D- 1250m - Total : 1893 miles / 3046 km

Je me réveille assez tôt en pensant que les moustiques seront au repos mais eux aussi sont sur le pont ce matin, et ils attendent, j’ai envie de dire, dard-dard que j’ouvre ma moustiquaire.
Aussi, je ne tarde pas. Je prépare toutes mes affaires à l’intérieur et me hâte pour ouvrir ma tente et tout ranger dans mon sac.
Impossible d’avoir un petit dej’ normal ce matin. Je me contente de 2 barres de céréales et déguerpis immédiatement en prêtant à peine attention au levé de soleil.
Comme je suis sur une crête mais pour peu de temps, j’en profite pour appeler mon frère dont c’est l’anniversaire. Le réseau se fait de nouveau rare depuis que je suis dans les forêts de l’Oregon.

La première pente annonce une journée un peu « up and down » en terme de dénivelé, ce qui me confirme que l’Oregon n’est pas tout plat.
C’est juste moins élevé que la Californie et je ne m’inquiète pas pour retrouver mes habituels 1000m de D+ minimum.
Le plus marquant de la journée finalement est la chaleur. Ça commence à grimper comme l’avait prédit la météo. A partir de mardi, ils annoncent au bas mot 41 degrés, ce qu’on appelle une « heat wave » 🥵🥵
Aujourd’hui, il ne fait « que » 36 degrés !
L’Oregon montre sa diversité aujourd’hui même si globalement, les forêts denses constituent pour moi sa principale caractéristique.
Je traverse d’abord un peu de forêt en n’oubliant pas de faire le plein d’eau. Aujourd’hui, je vais traverser une longueur de 30 km sans eau. Il faut donc remplir tout et user de stratégie fine ou alors se contenter de peu. Mais avec une chaleur étouffante, Impossible de rationner.
Je ne transporte plus que 3L désormais.
J’ai sacrifié une bouteille pour mon huile d’olive et j’ai arrêté de porter 5L me rendant compte que j’avais toujours 1L d’eau que je n’utilisais pas.
Je remplis mes 3 bouteilles et rajoute de l’eau dans le pot qui me sert à faire mon « coldsoaking », c’est-à-dire mon plat froid . Je conserve aussi ma poche à eau avec presque 1 litre d’eau que je filtrerai plus tard. Au total, un bon 4l.
Vers midi, je commence à être fatigué par la chaleur, je marche un peu en mode zombie, j’entends un bruit d’animal à ma gauche qui fourrage dans ce qui reste de verdure avant que je ne traverse une longue partie décharnée par les incendies. Je jette un œil habitué à la bonne 30aine de biches que je vois tous les jours… En effet, au 1er regard, c'est encore une biche …
Le quart de seconde que prend mon cerveau pour percuter que c’est un ours qui est en réalité à côté de moi et qui me fait soudainement tourner la tête, a suffi pour me faire repérer.
Comme le 1er ours que j’avais vu dans le nord de la Californie, il file en remontant la pente dans une synchronisation des 4 pattes ultra rapide et parfaite.
Je pense que c’était un jeune, un « cub » comme on dit, mais l’instant était une nouvelle fois d’une telle soudaineté, qu’il m’est difficile d’en être sûr.
En essayant de le retracer du regard, je vois un plus gros en haut d’une sorte de talus qui l’attend… c’est donc sa mère et j’ai la confirmation que c’était donc un petit que j’avais vu de si près.
Je dégaine vite mon appareil photo et j’essaye de les filmer mais ils sont déjà très loin, je n’arrive qu’à distinguer la mère à travers les branches.
Si au premier regard, je n’avais pas cru que c’était encore une biche, j’aurais pu avoir une très belle photo. Il faudra encore attendre pour avoir une belle photo ou une vidéo d’ours, mais la rencontre est une nouvelle fois émouvante et me revigore en entrant dans une partie qui devient d’un seul coup complètement calcinée.
Je regrette de ne pas m’être arrêté pour la pause déjeuner près de l’endroit où j’ai vu les 2 ours, car l’ombre est très rare et il fait une chaleur de dingue.
J’arrive tout de même à trouver un endroit un peu à l’ombre, je mange assez rapidement pour prendre le temps d’une sieste.

Je pénètre en fin de journée dans le parc national de Crater Lake, le terrain est redevenu plus vert.


Il me reste une descente jusqu’à Mazama Village, qui n’est en fait pas un village mais un camping avec un petit magasin et un restaurant. C’est ici que je me suis envoyé mon 3ème colis. Après une petite frayeur en voulant retirer mon colis que la personne du magasin ne trouve pas, la 3ème tentative est la bonne et je récupère mon colis.

Je vais au restaurant où je retrouve mes 3 compagnons que je n’avais pas vu depuis quelques jours.
Je tombe également sur les quelques hikers que je croise depuis 10 jours : Tink, Skippy, Duck, Care Bear and Dippy, Burrito et freebie.
Après avoir pris un Fish N’ Chips et du soda à volonté, j’installe ma tente à quelques centaines de mètres du restaurant.

J’ouvre mon colis et découvre ce que j’avais préparé il y a 3 mois. C’est marrant mais j’ai complètement oublié ce que j’avais si soigneusement prévu en avril. Il y a comme d’habitude un peu trop de nourriture, mais je suis content de retrouver quelques plats lyophilisés préparés. Ils sont toujours un peu trop lourds mais ils amènent pas mal de calories et j’en ai besoin.
Il y a aussi des chamallows. Je me souviens que j’en avais pris en me disant qu’ils seraient très appréciables lors des soirées froides au coin du feu. Mais en réalité, on ne fait pas beaucoup de feu sur le PCT. Ce qui ne m’empêchera pas de les manger.
Après avoir tout emballer dans mon sac, je me dirige vers les douches du camping. Ce n’est pas le grand luxe et surtout il n’y a pas de lumière dans les douches ni d’eau chaude d’ailleurs. Je prends donc une douche à la va-vite.
Mes 3 compagnons de route ont décidé de se lever très tôt demain car c’est la journée à Crater Lake et en fin d’après-midi, la famille de Sweeper, originaire de l’Oregon, a prévu de venir faire du trail Angeling… J’ai très envie de voir la famille de Sweeper, mais j’ai également envie de profiter à fond de Crater Lake demain et de faire un peu de grasse matinée. La découverte de Crater Lake doit être magnifique au lever de soleil, mais je ne peux résister à l’envie de dormir un peu demain.
J’attends ce moment depuis longtemps. Pour moi, Crater Lake fait partie de ces endroits que j’ai imaginé tellement de fois et vu tellement de fois dans des vidéos quand je préparais mon PCT. Au-delà de la beauté du site, c’est un lieu un peu mythique et irréel car il vous parait si loin quand vous vous préparez. Vous osez à peine vous dire que vous arriverez là et si c’est le cas, vous commencez à vous dire que l’arrivée au Canada est envisageable et que la traversée de l’ouest par la crête du Pacifique est vraiment possible.
En même temps, ça fait presque 3000 km que j’ai déjà parcourus en arrivant à Crater Lake, 3000 km… quasiment 3/4 du PCT.
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